Plonger dans le silence intérieur : l’œuvre de Michael A. Singer

Parfois, une rencontre ou un livre peuvent provoquer un véritable basculement intérieur. Ce fut le cas pour moi lorsque j’ai découvert le livre de Michael Singer « L’Âme délivrée » (The Untethered Soul en anglais). Ce livre a profondément modifié ma pratique de la méditation et ma manière d’être.

Depuis des années, je rêvais de rencontrer l’auteur, mais ce n’était pas évident car il habite aux Etats-Unis et ne voyage pas à travers le monde pour transmettre. Ces jours-ci, j’ai enfin eu le privilège de le rencontrer dans son centre, le Temple of the Universe, en Floride et d’assister à ses enseignements spirituels. Ce fut un grand moment qui comptera dans ma vie.

Cet article se veut un hommage à cet homme que je considère comme un maître, à son œuvre, à sa portée spirituelle, et à ce que j’en ai reçu — à travers le prisme de la méditation, mais aussi de la dimension chamanique qui, à mes yeux, se fait entendre dans son propos.

Qui est Michael Singer et quel est son enseignement ?

Michael A. Singer est un auteur et un enseignant spirituel américain, connu notamment pour ses best-sellers The Untethered Soul (L’âme délivrée), Living Untethered (Vivre sans limites) et The Surrender Experiment (non-traduit en français).

En 1975, il fonde le Temple of the Universe, un centre de méditation et de yoga à Alachua (Floride), ouvert à tous, toutes traditions confondues.

Son enseignement, résumable en quelques phrases, pourrait être : « Observer ce qui est depuis le siège de la conscience, laisser-être ce qui surgit, ne pas s’identifier à la pensée ou à l’émotion, et ouvrir l’espace intérieur à la liberté. »

Concrètement :

• Il invite à devenir l’observateur de ses pensées, plutôt que de s’y perdre.
• Il explique comment libérer l’énergie intérieure qui reste bloquée dans des blessures et des émotions telles que la peur, la colère ou des traumatismes passés.
• Il présente la méditation non seulement comme une technique, mais comme une façon de vivre — en permanence, dans le quotidien.

Dans son approche, je vois un parallèle évident avec le chamanisme : le siège de la conscience est comme la vision de l’aigle, le silence intérieur est l’état recherché pour communiquer avec les Esprits et le lâcher-prise des blessures et des traumatismes est ce que l’on obtient grâce à la récapitulation pour retrouver son intégrité et son pouvoir. Même si Michael Singer ne revendique pas lui-même l’étiquette « chamanique », le fond de son enseignement rejoint ce que beaucoup de traditions spirituelles profondes expriment.

« L’Âme délivrée » : un livre-clé

Dans L’Âme délivrée, Michael Singer nous guide pas à pas :

• Il commence par éclairer notre relation avec nos petites voix intérieures : comment nous sommes « pris » dans ce flux mental.
• Il explore ensuite l’énergie intérieure : comment cette énergie circule, comme un ruisseau, et comment elle se bloque lorsque la souffrance, l’attachement ou la peur s’emparent de nous.
• Enfin, il ouvre la voie à la liberté intérieure : accueillir ce qui vient, sans résistance, rester ouvert, « observer les pensées passer comme les nuages passent dans le ciel » — pour reprendre la belle image que j’aime tant.

Ce livre m’a aidé à comprendre :

• que la méditation ne consiste pas à faire taire la pensée par la force, mais à se retirer (= s’asseoir dans le siège de la conscience) : écouter les voix, observer les pensées et les émotions qui les accompagnent, puis les laisser partir,
• que cet espace d’écoute et d’observation permet d’atteindre le véritable détachement et la paix intérieure,
• que ce lâcher-prise libère et rend possible l’ouverture du coeur et l’apparition de la joie vraie.

Un extrait qui m’a particulièrement marqué :

« Rien n’est plus important pour votre propre croissance personnelle que de prendre conscience que vous n’êtes pas la voix qui parle dans votre tête – vous êtes celui qui l’entend. » ~ Michael Singer, L’Âme délivrée

Ce passage, simple et puissant, résonne comme un écho chamanique : l’éveil de la conscience, le passage de l’ego à l’Esprit, l’ouverture de l’espace intérieur.

La dimension chamanique de son enseignement

Pourquoi parler de chamanisme ? Parce que certaines clefs me paraissent converger :

Le silence intérieur – Dans le chamanisme, on apprend à « écouter » dans le silence, à entrer dans l’espace entre les mondes, à ressentir au-delà du discours. Michael Singer nous montre ce silence là, non pas comme un silence mort et vide, mais comme une présence vivante et libératrice.

Le lâcher prise – Le chaman lâche ses principes, son identité, ses croyances, sa tradition, son histoire personnelle, son ego pour devenir l’incarnation consciente de l’Esprit. Michael Singer appelle à « suivre le courant », à ne plus résister. Dans son livre The Surrender Experiment, il raconte comment il a laissé la vie le traverser.

La transformation énergétique – Le chaman utilise des techniques énergétiques, des rituels, des objets de pouvoir, des états modifiés de conscience pour guérir et se libérer. Michael Singer parle des énergies bloquées au niveau du coeur et de l’ouverture à la vie véritable.

L’expérience directe – Le chamanisme ne se contente pas de lectures. Pour lui, l’essentiel est dans la pratique et l’expérience vécue. De même, Singer encourage fortement la pratique, l’expérimentation, la présence.

Lorsque je suis allé à sa rencontre au Temple of the Universe, j’ai senti cette alliance : un lieu de silence, de chant, de méditation commune, où règne la paix et la sobriété, où l’énergie circule, où la joie explose et où l’on est invité simplement à lâcher prise. Ce fut, pour moi, une cérémonie, au sens large du terme.

Mon expérience personnelle – ce que cela a changé en moi

Je voudrais partager trois effets concrets qu’ont eu ce livre et cette rencontre sur ma pratique et ma vie :

Entrer véritablement dans le silence intérieur
Auparavant, ma méditation était concentrée sur le fait de « faire taire » les pensées. Après avoir lu Singer, j’ai compris que je n’avais qu’à être un témoin et laisser les pensées et les émotions être sans m’y impliquer. Le rôle de la méditation est devenu moins « faire », plus « laisser être ». L’image des nuages passant dans le ciel m’est alors apparue clairement : je ne suis pas les nuages, je suis celui qui les observe.
Grâce à ce changement de posture, j’ai pu atteindre des instants de paix plus profonds — non pas parce que je « contrôlais », mais parce que je « laissais ».

La transformation de ma relation aux pensées et aux émotions
J’ai cessé d’être l’esclave de mes réactions. Quand une pensée surgit : « Ah, encore la colère », je la vois, je la ressens et je la laisse passer, comme un visiteur. Et je reviens à l’espace infini. Cela a allégé considérablement ma vie intérieure. Et j’ai senti son impact sur ma pratique chamanique. Depuis, je suis plus en capacité d’écouter, d’être en ouverture et de me laisser porter par l’invisible.

La méditation comme pratique de vie
L’un des apports majeurs est d’intégrer la méditation dans l’ensemble de mon quotidien. Je ne médite plus seulement au moment de « l’assise », mais aussi en marchant, en mangeant, en conduisant ma voiture, en faisant mon Qi Gong ou mes pratiques spirituelles.
Au Temple of the Universe, l’atmosphère était tellement sereine et tranquille. J’y ai ressenti que l’état méditatif pouvait devenir mon cadre de vie — ce qui rejoint directement les pratiques chamaniques de continuité entre le profane et le sacré.

Quelques clés pour relier l’enseignement de Michael Singer à votre propre chemin

Voici quelques pistes pratiques, inspirées de Michael Singer, mais intégrables dans une perspective chamanique, pour approfondir votre méditation ou votre chemin intérieur :

Écoutez « l’observateur »
Dans votre méditation, cherchez non seulement le calme, mais « qui observe et entend » ce calme. Quand une pensée ou une voix intérieure surgit, ne lui donnez pas de suite immédiate. Prenez du recul et revenez au silence.

Pratiquez le lâcher-prise actif
Face à une émotion forte ou une pensée récurrente : imaginez-la comme une bulle dans l’eau, qu’on laisse remonter à la surface, éclater, puis disparaître. Faites-le plusieurs fois.

Transformez la méditation en rituel de vie
Le chaman ne dit pas « je fais ma pratique », mais « ce sont mes pas eux-mêmes qui sont ma pratique et ma méditation ». Intégrez une mini pause consciente à chaque changement de posture, chaque transition dans votre journée.

Entrez dans l’espace entre les pensées
Michael Singer parle de cet « espace entre les pensées », fertile, silencieux. Dans vos moments de veille, arrêtez-vous 30 secondes, respirez, relâchez tout. Soyez l’espace.

Approchez la vie comme une cérémonie
Même un geste banal peut devenir rituel : verser de l’eau, respirer, remercier. Au Temple, j’ai transformé un simple lever du soleil en moment de vénération silencieuse. Cela modifie la perception du temps.

Comment cet enseignement nourrit ce que nous transmettons au sein des Gardiens du Feu ?

Dans le cadre de la tradition chamanique que nous partageons au sein des Gardiens du Feu, il me semble que l’œuvre de Michael Singer apporte :

• Une éthique d’ouverture : son centre vous accueille « quel que soit votre chemin spirituel ». Cela rejoint la vision chamanique où les chemins de l’Esprit sont multiples.
• Une pratique incarnée : pas uniquement théorique. Le « temple intérieur » est une réalité à vivre.
• Une dimension de libération : se libérer des prisons de l’ego, de la peur, du contrôle. Cela résonne avec la vision chamanique de la guérison et du saut vers la liberté.
• Une connexion à la vie quotidienne : pas seulement le rituel spectaculaire, mais chaque geste, chaque instant peut porter le sacré.

En tant que gardien·ne du Feu — celui du cœur, de l’intention, de la conscience — vous pouvez intégrer l’enseignement de Michael Singer comme un feu qui va non pas allumer un nouveau feu extérieur, mais entretenir votre foyer intérieur.

En guise de conclusion

À travers cette réflexion, je vous propose humblement d’entrer dans l’univers de Michael Singer non pas comme dans un livre de plus, mais comme dans un espace à habiter. Il ne s’agit pas d’acquérir davantage, mais de réaliser que vous êtes déjà ce vaste ciel — que les pensées, les émotions, les événements sont les nuages qui passent.

Ce que vous avez découvert, ce que j’ai découvert, c’est que la méditation n’est pas le silence après la guerre, mais le silence vivant au milieu de la vie.

Et ce silence, c’est le cœur du chamanisme, c’est la clairière où l’on retrouve l’Esprit, c’est le foyer des Gardiens du Feu.

Au plaisir d’échanger sur vos expériences, vos résistances, vos seuils de transformation.

Avec respect et gratitude pour le feu sacré de la méditation.

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